Maria Papa Rostkowska - sculptrice du bonheur
Maria Papa Rostkowska est une artiste qui s’est imposée de manière incontestable dans l’histoire de l’art du XXe siècle. Elle s’est liée d’amitié et a exposé ses œuvres aux côtés de grands noms comme Jean Arp, Henry Moore, Lucio Fontana et Marino Marini. Bien qu’elle ait commencé à sculpter relativement tard, comme Jean Arp, c’est dans cet art qu’elle s’est pleinement réalisée, allant jusqu’à transformer sa vie pour lui. Elle décrivait son travail comme « un art du bonheur, un art de la lumière ». Ses sculptures, aux formes fluides et légères, semblent capturer la lumière et sont conçues pour émouvoir, suscitant des sentiments positifs chez le spectateur. Maria Papa Rostkowska privilégiait la technique de la taille directe dans la pierre, qu’elle considérait comme essentielle car elle permettait à l’artiste de rester en contact intime avec la matière. Le marbre était son matériau de prédilection, et c’est dans ce médium qu’elle a créé certaines de ses œuvres les plus admirées par les critiques et collectionneurs.
Maria Papa Rostkowska, Studio Henraux Querceta di Seravezza, ca. 1966, © Nicolas Rostkowski Archives |
Maria n’avait pas peur de prendre des risques, ni de changer de vie pour poursuivre ses rêves. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle participa au sauvetage de Juifs du ghetto de Varsovie. En 1957, elle quitta la Pologne pour s’installer à Paris, bien qu’elle ait déjà acquis une solide réputation artistique dans son pays. Et en 1966, elle n’hésita pas à quitter son deuxième mari, le critique d’art Gualtieri di San Lazzaro et son cadre de vie confortable pour s’installer à Pietrasanta, en Toscane, où elle poursuivit sa carrière de sculptrice.
Gualtieri di San Lazzaro, Maria Papa et André Verdet, 1969, © Nicolas Rostkowski Archives |
Née à Varsovie en 1923, Maria Papa Rostkowska était la deuxième des quatre filles de Nadieja Juduszkin et Boleslaw Baranowski, un couple qui s’était rencontré à Moscou avant la révolution bolchevique. Pendant son enfance, elle passait souvent ses vacances à Slonim (aujourd'hui en Biélorussie), dans la ferme de ses grands-parents. C’est dans cet environnement naturel, entourée d’animaux qu’elle adorait, qu’elle se sentait le plus heureuse. Ces souvenirs d’enfance sont restés ancrés dans sa mémoire comme une époque utopique, un « paradis perdu » qu’elle évoqua tout au long de sa vie.
Maria Papa Rostkowska et Juan Miró, Galerie XXe Siècle, Paris 1964, © Nicolas Rostkowski Archives |
Maria Papa Rostkowska à la Galerie XXe Siècle, Paris 1964, photo Nicolas Rostkowski, © Nicolas Rostkowski Archives |
Venus innamorata, 52 cm, marbre blanc de Carrare, © Nicolas Rostkowski Archives |
Baiser, marbre blanc de Carrare, © Nicolas Rostkowski Archives |
Maria Papa Rostkowska avec Anna-Eva Bergman, Colombe d'Or, Saint-Paul de Vence 1964 © Fondation Hartung Bergman Archives |
Dufy fleur, marbre blanc de Carrare, 90 cm, © Nicolas Rostkowski Archives |
On dit souvent que « tous les chemins mènent à Rome ». Quant à Maria Papa, son destin la conduisit à Pietrasanta. Elle fut guidée vers son matériau bien-aimé : le marbre. En 1966, elle fut invitée à participer au Symposium du Marbre, organisé par les Carrières Henraux à Querceta, di Seravezza, petite ville ligurienne du nord de l'Italie, reconnue comme un véritable paradis pour les sculpteurs. Là, elle découvrit ce matériau classique et noble. Les villes de Querceta et Pietrasanta, situées à environ 10 kilomètres de Carrare, sont réputées pour leurs conditions idéales pour les artistes, car elles regorgent de carrières d'où est extrait le marbre, ainsi que de nombreuses fonderies et d’ateliers d’artistes polyvalents. La même année, sur la recommandation de Lucio Fontana et de Jean Arp, elle reçut le prestigieux « Prix Nelson William et Noma Copley pour la sculpture », renforçant ainsi sa conviction que la sculpture était son véritable destin. À 43 ans, Maria décida de changer radicalement de vie. Elle se sépara de son mari, tout en maintenant de bonnes relations avec lui, et se fixa définitivement à Pietrasanta. Elle loua un atelier au cœur des carrières Henraux à Querceta, à proximité de celui du célèbre Marino Marini. Sous l'influence de Marini, elle commence à tailler directement le marbre, une technique extrêmement exigeante, surtout pour une femme de corpulence moyenne.
Musée de Menton au Palais de Carnoles, Jardin de sculptures, photo Nicolas Rostkowski, © Nicolas Rostkowski Archives |
Ubu Roi, terra cotta, 90 cm., Collection du Musée de l’Hospice Saint Roch, © Nicolas Rostkowski Archives |
Maria Papa Rostkowska créa une large gamme de sculptures en marbre et en pierre, allant des œuvres de grande taille, voire monumentales, à des pièces plus intimes, adaptées aux différents Salons dans lesquels elle exposait. Pour elle, le marbre n'était pas seulement un matériau, mais un acteur influençant la forme finale de ses œuvres. Elle décrivit ses premières expériences de travail du marbre de la manière suivante : « J'ai sculpté pour la première fois du marbre blanc /../. tout à coup, j'ai perçu la beauté de cette pierre, la lumière qui en émanait. J'ai vécu quelque chose de spécial, une sorte d'illumination ».
Maria Papa Rostkowska et la sculpture Soldat, Collection Banca Intesa, Milan, © Nicolas Rostkowski Archives |
Les années suivantes furent marquées par des voyages, la découverte du monde, son travail et de nombreuses expositions. Maria Papa Rostkowska visita les États-Unis, l'Inde, la Russie et l'Iran, exposant ses sculptures en Italie, en France, au Japon, en Russie, en Pologne et aux États-Unis. Elle ne retourna dans sa ville natale, Varsovie, qu’après le changement du régime, en 1994, accompagnée de sa vieille amie Rosetta Corsetti. En 2001, l'artiste subit un AVC, mais, malgré une santé déclinante, elle ne cessa jamais de sculpter. Au cours de sa carrière artistique, elle participa à plus d'une centaine d'expositions individuelles et collectives. Elle créa environ 300 sculptures. Sa dernière œuvre fut réalisée trois mois avant sa mort en 2008. Maria Papa Rostkowska repose au cimetière du Montparnasse à Paris, aux côtés de son second mari. Conformément à ses souhaits, sa tombe est ornée d'une sculpture de sa propre création, intitulée « Guerrier ».
Les œuvres de Maria Papa Rostkowska dans les collections publiques :
- Centre de Sculpture Polonaise à Orońsko
- Musée National de Varsovie
- Musée de la Sculpture « Królikarnia » à Varsovie
- Palais Présidentiel à Varsovie
- Musée de l’Hospice Saint Roch (Issoudun)
- Musée de Nantes
- Musée Despiau-Wlérick, Mont de Marsan
- Musée d'art et d'histoire de la Ville de Meudon
- Musée de Menton, Palais Carnolès
- Crèche municipale, Rue Dumeril/Pirandello, Paris
- D.A.S.C.O., rue de l’Arsenal, Paris
- Consulat français à Houston, Texas (USA)
- Musée de la Sculpture en plein air de Paris
- Palais Bourbon, siège de l’Assemblée Nationale
- Université des Études, Milan
- Parc International de la Sculpture de Pietrasanta
- Museo dei Bozzetti di Pietrasanta
- Banca Intesa, Milan
- Fondation Henraux, Querceta di Seravezza (Pietrasanta)
- La ville de Sopot
- Musée du Palais Royal de Łazienki à Varsovie
- Le Musée des Beaux-Arts de Dijon
Expositions muséales posthumes
2009 : Hommage lui est rendu, au Chiostro Sant’Agostino à Pietrasanta : Omaggio a Maria Papa. Commissaire : Valentina Fogher
2010 : Participation à l’exposition Michel Angelo and His Heirs au Musée des Beaux-Arts de Montgomery (Alabama).
2014 : Exposition au Musée National de la Sculpture de Pologne au Palais de Krolikarnia à Varsovie : Maria Papa Rostkowska : La femme de marbre. Commissaires : Joanna Torchala et Agnieszka Tarasiuk
2014 : Participation à l’exposition de l’Institut Culturel italien de New York : Les artistes de Pietrasanta. Commissaire : Valentina Fogher
2015 : Exposition au Musée Chopin – Bibliothèque Polonaise de Paris : La passion de la sculpture. Commissaires: Anna Czarnocka et Agnieszka Tarasiuk
2017 : Exposition au Museo d’Arte Contemporanea Cascina Roma de San Donato Milanese (Milano) : Maria Papa Rostkowska – Le opere, gli amici, i luoghi. Commissaire: Stefano Cortina. Cette exposition a été organisée avec le « patronato onorario « de Madame Kornhauser- Duda , l’épouse du Président de la République Polonaise
2017 : Participation à l’Exposition : Jean Arp et la Pologne, au Musée National de Pologne à Poznań. Commissaire: Marta Smolinska
2020/21: Exposition au Musée de l‘hospice Saint-Roch, Issoudun : Maria Papa Rostkowska, Une sculptrice au cœur de la Nouvelle École de Paris. Commissaires: Lydia Harambourg et Patrice Moreau
2022: Exposition Maria Papa Rostkowska et ses affinités artistiques, Jean Arp, Emile Gilioli, Marino Marini. Musée d'art et d'histoire de la Ville de Meudon7.Commissaires Marianne Lombardi et Lydia Harambourg
2022: Mostra Collezione Henraux 1960-1970. Curatore : Edoardo Bonaspetti.
2023: 4 mars - 4 juin : Résonance Haptique de la Matière. Musée de la Sculpture Contemporaine » à Oronsko (Pologne). Exposition commémorative du centenaire de la naissance de l’artiste. 65 sculptures sont présentées. Commissaire : Marta Smolinska.
2023: 3 juin - 10 septembre : Wifredo Lam et les magiciens de la mer. Museo della ceramicha di Savona. Elle expose deux terres cuites à côté de Lucio Fontana, Giuseppe Capogrossi, Jorn…
2023: 9 septembre - 3 décembre : Promesse de bonheur. Musée du Palais Royal de Łazienki à Varsovie. Ses sculptures sont mises en dialogue avec les oeuvres de la glyptothèque de Stanislas Auguste, le dernier roi de Pologne. Commissaires: Malgorzata Grabczewska et Anna Szary2023: 21 septembre : Hommage lui est rendu à l’Assemblee Nationale au Palais Bourbon à Paris. La Présidente de l’Assemblee prononce un discours en son honneur devant la sculpture Promesse de Bonheur (3 mètres de hauteur en marbre blanc de Carrare) qui fait partie des collections nationales françaises.
2024: 13 avril - 14 juillet. Musée de la Fondation Coubertin. Saint Remy les Chevreuse, Paris. Maria Papa Rostkowska - Sculptrice à la rencontre du marbre. Commissaire Lydia Harambourg. Conseiller scientifique : Nicolas Rostkowski
2024: octobre - mai 2025: Autour du Surréalisme. Musée de l'Hospice Saint Roch. Issoudun. L'artiste présente sa sculpture en terre cuite "Ubu Roi" symbole de l'absurdité de la guerre. Cette oeuvre fut exposée au Salon des Réalités Nouvelles en 1963. Elle fut exécutée à Albisola (Italie) dans l'atelier de Tullio Mazzotti.
Les photographies dans cet article proviennent des l'archives privées de la famille Rostkowski et les archives de la Fondation Hartung Bergman. Un grand merci à Joëlle et Mikolaj Rostkowski pour leur aide à l'illustration et pour les corrections linguistiques de cet article, ainsi que pour les informations sur l'artiste.
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